Un bal

La nuit flotte, dérive et déraille.Elle t’enlace d’un élan glacé, net et cristallinqui saisit et meurtrit en noces hivernalesà traîne de Lune pointue solitaire,puis trace, majestueuses, une courbe arabesqueoù bercer tes émois amoureux, en traîne de comètes,poudres d’étoiles, poussières de planètes. La nuit scande alors un bal mélancolique. Seulement voilà que l’une inviteun éclat de…

Ronde de nuit, ou apaisement

Le calme descend, lentement gagne et se répand comme une laque pacifiant l’instant et les jours, rendant au souffle rythme et mesure, baigné qui s’abreuve à l’onde soudain déployée comme source de jouvence, ambre fidèle. L’urgence s’est tue, grelot étouffé sous le rideau dont les plis retombent exactement en place, escamotent la coulissedans un soupir…

6102018

Parfois les astres s’alignent au-dessus de la pagaille des images, des paroles en désordre, de l’efflorescence des draps, au-dessus des rêves grands et du petit quotidien. L

260818

Nuit diaphane par-dessus les rues,
et, lointain d’être si proche, au milieu,
le buvard rond qui voit flou, grossi
d’épanchements versés en douce,

Nuit des rois (André Rougier)

Exige tes gages et va-t’en, loin de ces poitrines de rechange, de ces festins de tatouages, des orques frottant leurs hanches sur tes talus, de ce que du poing l’on brise, là où l’avant-printemps se tait, étrangle les mensonges qui giclent sur les seuils, fais du temps ce prêté-rendu que l’on ne raconte pas, ni…

180118

Les ponts jetés dans la nuit, quand le monde tourne, et nous avec, un allant léger et il n’est plus de résistance, nous glissons sans chavire et les sillages de regrets et d’oublis se font sourires dans l’heure d’encre transparente, seconde peau qui à nos lèvres porte les saveurs présentes et enfuies en un même…

Esther 2.1

Il m’avait entraînée dans la nuit sur un ordre bref, « Marchons. » Je lui avais emboîté le pas par automatisme, sans me demander quelles étaient ses intentions. Être méfiante m’aurait réclamé trop d’efforts, et puis je m’en fichais pas mal, au fond. Le rythme de nos pas, leur écho contre les façades de la ville qui…

Esther 1.2

Tout ce qu’ils n’avaient pas dit alors, tout ce qu’ils avaient dit depuis, passait et repassait en trombe dans un tourbillon de pensées, et j’avais beau accélérer, mon pas n’était jamais assez vif pour le faire taire, le distancer, revenaient tous les mauvais augures, multipliés, revisités, inventés, j’avais beau fuir, cela ne suffisait pas, et…

La ville et lui 4/7 (Anh Mat)

Chambre à l’heure, sans fenêtre, dégâts des eaux inclus. La douche fuit. Supplice des gouttes d’eau qui résonnent dans le noir. Dans la corbeille des mouchoirs froissés recouvrent la capote de l’heure précédente. Je tente de m’assoupir sur le drap humide, baigne avec dégoût dans la sueur d’une dernière étreinte. J’attends le bout d’un jour…

La ville et lui 1/7 (Anh Mat)

La sonnerie du réveille-matin pénètre dans le rêve. J’ouvre les yeux, la conscience encore lourde d’étrangetés. Dormi deux heures. Appelons ça une sieste nocturne. C’est tôt. Juste avant la lumière. Jour et nuit se confondent. Aube dans le noir. Nuit déjà trop claire pour être encore la nuit. Bruit de camion benne. Montée en régime…

Grégory Hosteins, Studio Nuit

Je ne suis sûr que d’une chose : le carreau sale derrière lequel je le vois, se tenir droit comme un i, laisse opaque et transparent le moindre accent de sa voix. Là-bas se récite quelque chose. Une vie, un poème. Du moins je vois ses lèvres qui bougent, sa gorge forcer à grands traits le passage douloureux que les mots empruntent quand il les formule (certains, dirait-on, pour la première fois, il tousse alors et porte ses mains à sa bouche mais son discours ne cesse pas : le visage dans les mains, il reprend, et s’il le faut plusieurs fois). (Grégory Hosteins, Répertoire)

Anh Mat, Les nuits échouées

Monsieur M. commence, submergé par l’écoute, face à la page déjà noire d’absence de mot.
A l’origine un trouble, une difficulté à se confier, comme si chaque chose prononcée pouvait le trahir, révéler le secret qu’il garde sur le bout de sa langue, derrière les dents serrées de sa bouche fermée comme un poing.
(Anh Mat, « L’origine de Monsieur M. »)

On the rails II

où les pas n’en finissent pas de se répercuter

À chaque pas répondent mille échos.

La semelle quitte le sol et dans son sillage s’envolent la nuée papillonnante des rêves tout éveillé, la nuit est claire, la lune pleine badigeonne de craie les façades silencieuses qui bordent le fleuve, s’y noie en une éclaboussure de reflets,

Voyage au bout de la nuit _ Arnaud Maïsetti

[L’]articulation d’une seule nuit traversée par des voix, et le faisceau des voix recompose la nuit au-devant d’elle, la nomme, creuse la faille en son milieu et ouvre la possibilité d’un retour après l’enfoncement jusqu’à son cœur.[…] Prendre soin d’articuler chaque mot – quand on suit les voix, on ne se trompe pas ; on…

Intérieur nuit

C’est l’heure de la nuit où suffisent un souffle, une lueur, lorsque cesse et se poursuit chaque chose, le temps lâché en roue libre. L’obscurité a remisé déjà les lassitudes du jour. Seule règne la nuit et son eau est limpide, où chaque son résonne, chaque couleur s’accorde. S’y amplifient le geste et la pensée, justes…