1.
Son fantôme m’accompagne
– l’ombre sous mes pas
Parfois m’enveloppe, douce et chaude
– contre les frimas.
2.
Le jour va et flotte, léger comme l’air
– cœur vacant.
Quelques mots volent, un émoi
– d’étoupe, mais lent.
3.
Le passé en pagaille tourbillonne
– réfection d’idéal.
La vie shoote et monte au cœur
– en crue cavale.
4.
La douleur fend l’écorce
– épanchement de sève
Bientôt la redouble
– ne t’endurcis pas, rêve.
5.
Je ne sais me résoudre et me rendre à l’air du temps
– sûr, pragmatique, mesurable.
Plutôt mille gueules de bois que ce bonheur mesquin,
– sa prudence de comptable.
6.
Brusquement moi en moi-même tombée
– comme une pierre, mais en silence.
Ou bien le corps qui rappelle à lui
– la gravité comme une absence.
7.
Qu’est-ce qui couve sous tes paupières closes
– un songe ou une peur ?
Que gardes-tu, jaloux de la lumière
– quand t’accueille la couleur ?
8.
L’automne indécis rayonne et pleut
– en lueurs sur le pavé.
Les mots qui me viennent ont ta tournure
– le parc est rouge échevelé.
9.
Le ciel a viré triste. Je ferme les yeux
– accueille l’abandon.
Il faudrait un sourire, un regard, un baiser
– ni rime ni raison.
10.
D’un coup tout s’abat, repeint morne
– mort dans l’âme, larmes aux yeux
Fin de féerie avant fin de partie
– rien ne va plus, faites vos jeux.
11.
Ce qui de sa bouche à mes lèvres fusa
– l’éclair du don absolu
Illumine encore mon regard
– par-delà ce qui n’est plus.
12.
Quelque chose fond en douce, s’épanche,
– chuchotis de soie
Discret et profond, en taches de lumière
– qui déborde vers toi.
13.
Une étincelle et un retard
– une caresse mi-rétive
Tu m’as rendu le temps
– ses jeux, ses esquives.
(Image d’accueil : Hilma af Klint, The US Series, Group VIII, No. 6, 1913.)
